Page:Twain - Le prince et le pauvre, trad Largilière, 1883.djvu/60

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Le premier gentilhomme du gobelet se tenait à quelque distance du premier gentilhomme de la serviette. Il devait prévenir le geste que ferait Tom pour demander à boire.

Il y avait aussi le premier gentilhomme de la dégustation, prêt à goûter les mets suspects, au risque de s’empoisonner. Cette charge n’était plus qu’honorifique, et le gentilhomme qui en avait le privilège ne l’exerçait plus que fort rarement ; mais il y avait eu des temps peu éloignés où cette dignité, enviée sans être enviable, ne laissait pas d’avoir ses périls. On aurait sans doute mieux fait de la confier à un chien ou à un misérable déjà condamné à mort ; mais les rois et les princes ont leurs idées qui ne sont pas celles de tout le monde.

Il y avait là encore mylord d’Arcy, le premier gentilhomme de la chambre, qui y faisait je ne sais quoi, mais qui y était en tout cas. Il y avait le lord premier sommelier, qui se tenait derrière le siège de Tom pour surveiller le cérémonial, sous les ordres du lord grand-sénéchal et du premier gentilhomme de la cuisine.

Tom avait comme cela trois cent quatre-vingt-quatre officiers attachés à sa personne. Ils n’étaient pas tous présents, cela se conçoit, car la pièce en eût à peine contenu le quart. Aussi Tom ne se doutait-il point qu’il eût besoin de tout ce monde pour boire, manger, dormir et se mouvoir.

Tous ceux qui étaient là avaient reçu le mot d’ordre ; ils avaient été avertis de l’indisposition passagère du prince ; ils savaient qu’ils n’avaient pas à se montrer surpris de ses excentricités. Précaution fort utile ; car ces « excentricités » ne tardèrent pas à se manifester. Seulement elles ne firent