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LE REPAIRE DES PIRATES.

leurs souffrances. Joe aurait voulu se faire ermite, se réfugier dans une caverne où il se nourrirait de racines et périrait un jour ou l’autre de chagrin. Tom lui rappela qu’un ermite doit se passer de compagnons, lui démontra qu’une vie de crime présentait des avantages évidents, et son ami reconnut qu’il valait mieux devenir pirate. Il objecta toutefois que si un ermite doit se passer de compagnons, des pirates ne peuvent se passer d’un navire.

— Le navire viendra plus tard, riposta Tom. J’ai déjà trouvé un repaire, c’est là l’essentiel. Que penses-tu de l’île Jackson ?
Le serment.

— Fameux ! répliqua Joe Harper. Il n’y pousse pas de légumes ; mais nous y trouverons plus de poissons et d’œufs de tortue qu’il ne nous en faudra.

À une lieue au-dessous de Saint-Pétersbourg, à un endroit où le Mississippi n’a guère qu’un mille de largeur, s’étend une longue île boisée dont une plage basse, située à une de ses pointes, rend l’abord facile. Elle offrait un abri d’autant plus sûr que personne ne l’habitait, et elle touchait presque l’autre rive du fleuve, en face d’une forêt non exploitée. Certes, nos forbans ne pouvaient souhaiter un meilleur repaire. Quant à savoir quelles seraient les victimes de leurs pirateries, c’était là un détail dont nos deux écoliers ne se préoccupèrent pas pour le moment.

— Je songe à une chose, dit Tom, lorsque le point capital eut été réglé. Nous ne sommes que deux, ce n’est pas assez.

— Tâchons d’enrôler Huck, répliqua Joe. Il s’agit seulement de le