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UNE VIE BIEN REMPLIE

cent l’an, les références des livraisons sont remises aux maisons d’achats à Paris.

Les articles de Chine et du Japon sont vendus par les maisons de Paris pour leur compte ; les marchandises destinées à être consommées en France paient les droits d’entrée ; celles destinées à être réexportées le sont directement aux ports français pour y être embarquées à destination d’un autre pays.

Il est souvent curieux de lire à la première page des journaux des articles furibonds contre les objets fabriqués à l’étranger, alors qu’en quatrième page, ils font de la réclame payée pour ces mêmes objets.

Est-ce qu’à l’étranger on peut se passer des soieries de Lyon, des rubans de Saint-Étienne ou des vins français ; de même qu’en France on ne peut se passer des tussors, des pungées fabriqués au Japon, des tapis d’Orient, ainsi que des meubles en bois courbé de Vienne ; est-ce que les maisons en vue, pour répondre aux besoins de la clientèle cosmopolite ne doivent pas avoir les articles qui leur sont demandés ; il faut aller avec son époque.

Ainsi, il est des articles d’Allemagne, consommés en France, qui sont démarqués aussitôt dédouanés, tels des manteaux et paletots riches pour dames qui coûtent jusqu’à cinq cents francs pièce et, aussitôt reçus, sont emportés dans un dépôt, étiquetés et mis en vente comme articles français ; il est curieux de lire alors sur les bons journaux patriotiques à peu près ceci : « On reconnaît à ces articles le cachet, le goût bien français. »

Quand donc n’y aura-t-il plus de frontières pour que les peuples luttent seulement pour le progrès.

Aujourd’hui que la vie économique se développe si rapidement l’homme ne peut plus vivre isolé, que ce soit dans l’industrie ou le commerce ; patrons, ouvriers ou employés se groupent en syndicats.

La corporation des agents représentants, dont je faisais partie, avait échappé à cette loi de progrès ; le plus grand nombre d’esprit individualiste, du chacun pour soi dans toute la force du terme ne prêtait qu’une oreille distraite aux mots de groupement, solidarité ; enfin, vers 1895, grâce à l’énergie de quelques-uns, et surtout à la grande valeur de