Page:Une Vie bien remplie (A. Corsin,1913).djvu/115

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
111
UNE VIE BIEN REMPLIE

l’un d’eux, (dont la société fit plus tard, son président), une chambre syndicale fut fondée, d’essence patronale, puisqu’il fallait être patenté pour en faire partie ; elle fit sentir de suite son influence : le niveau moral de la corporation s’éleva, les mots d’entente amicale, de solidarité ne furent plus prononcés en vain, les rapports entre agents et négociants s’adoucirent peu à peu.

Certainement que ces messieurs ne sont pas encore prêts à traiter sur le pied d’égalité avec les représentants, qui dans les relations d’affaires ont coutume de dire : « Je suis à votre entière disposition », les acheteurs, eux, ne disent jamais aux représentants qu’ils sont à la leur ; c’est ce qui faisait dire un jour, en plaisantant, à un ami du président : « Obtenir que les acheteurs traitent les représentants sur le pied d’égalité est chimérique, mais si notre président pouvait espérer que ses efforts soient récompensés par le ruban de la Légion d’honneur, il le tenterait, cet homme de mérite serait capable de réaliser des choses très difficiles pour l’obtention d’un bout de ruban. Je crois même qu’il arriverait à trouver la quadrature du cercle s’il voyait au bout être fait grand-croix. »

Les remarques que j’ai pu faire dans les différents cercles ou syndicats que j’ai fréquentés, c’est que chez les ouvriers les initiatives se font jour plus souvent que dans les syndicats patronaux, mais, en général, dans les deux camps, on est trop timide, trop moutons de Panurge, un bon nombre se contentent de payer les cotisations et n’assistent jamais aux réunions.

Un fait aussi digne de remarque, c’est la différence qu’il y a de juger, de solutionner une affaire dans un syndicat ouvrier et un syndicat patronal.

Un exemple : Un représentant avait soustrait une somme d’argent à l’un de ses collègues (qui, lui, le traitait en ami) ; de plus, il avait écrit des calomnies à l’un de ses fabricants et sollicité sa représentation ; ses faits étaient prouvés par sa correspondance. Cela fut mis sous les yeux de la Commission des conflits, l’affaire resta en délibéré pendant un an ; au bout de ce temps, le Président écrivit au plaignant une lettre dans laquelle il disait que le coupable avait fait des excuses, que la Commission, au nom de la Chambre