Page:Une galerie antique de soixante-quatre tableaux (Philostrate de Lemnos, trad. A. Bougot).pdf/260

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

montre à nous sur un grand nombre de vases ; un corps fait d’une écaille de tortue ; un chevalet portant les cordes ; des montants formés de cornes de bouc ou de bœuf ; sept cordes s’étendant à la fois sur la table d’harmonie, et entre le joug et lécaille, c’est-à-dire, à vide ; ce qui n’avait pas lieu dans toutes les lyres ; dans quelques-unes, en effet, les cordes partant du joug ne dépassent pas le bord supérieur de l’écaille où elles sont fixées (1).

Suivant quelques anciens, Amphion avait ajouté une quatrième corde, appelée nét6, à la lyre (2). Le peintre suit ici une autre tradition, puisque la lyre d’Amphion a sept cordes. Philostrate explique ce fait en sophiste ; selon lui, Thèbes ayant sept portes, la lyre qui en a construitles murs, ne pouvait pas avoir moins de sept cordes. Tel était aussi, ce semble, l’avis du poète Onétès auteur d’une épigramme sur la ville de Thèbes. « Je fus bâtie au son de la phorminx, moi la ville de Thèbes, et renversée au son de la flûte : honte à la muse destructive de l’harmonie ! sur le sol gisent les débris de mes tours, cespierres que charmaitlalyre, sourdes aujourd’hui ; ces pierres qui dociles à la muse ets’appareillant d’elles-mêmes, formèrent une muraille, ouvrage sans fatigue de tes mains, à Amphion, car c’est la lyre aux sept cordes qui fonda la patrie aux sept portes(3). » Philostrate et Onétès auraient pu d’ailleurs se dispenser d’aller chercher si loin une explication pour les sept cordes ; d’après l’hymne d’Homère, la lyre montée par Hermès avait sept cordes (4), et c’est Hermès qui a fait don de la lyre à Amphion.

Le costume d’Amphion mérite d’être remarqué. Les chantres, les citharèdes sont ordinairement représentés, la tête ceinte d’une coiffure élevée, le corps enveloppé d’une robe traînante ; quelquefois, pour Apollon, par exemple, la coiffure élevée est remplacée par une couronne de lauriers. Amphion porte la mitre, coiffure lydienne, destinée à rappeler peut-être qu’Amphion, gendre de Tantale, emprunta aux Lydiens, leur système musical, leur har- monie, dit Pausanias (5), mais au lieu d’avoir la longue robe, il est vêtu d’une chlamyde, manteau court, que l’art antique jette quelquefois sur les épaules d’Apollon citharède (6). Une grande liberté semble d’ailleurs avoir élé laissée aux artistes grecs, pour les costumes : c’est ainsi que dans le tableau de Polygnote à Delphes, qui représentait les Enfers, Orphée était vêtu en Grec au lieu de porter, comme le voulait la tradition, la robe et la coiffure d’un chanteur thrace (7).

Philostrate nous dit que les pierres venaient d’elles-mêmes se mettre en place pour servir de fondement ou pour exhausser le mur. On a vu là un dé-

{1) Voir Fétis, His. gén. de la Musique, IL, p. 250 et sui. (2) Paus. 7 : (8) Anth., IX, % (4) Hom., Hym. ad Mere., 51. (G) Paus., IX, V, 7 (6) Ant. d’Here., III, 5 ; Roux, IV, 68. (F) Paus., X, 30, 3 ; O Jah. Einleit ên die Vasenk., V. p. 210 ; Hoydemann, Arch. Zeit. 1868, 4.