Page:Une galerie antique de soixante-quatre tableaux (Philostrate de Lemnos, trad. A. Bougot).pdf/425

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son de Pindare, et près de cette maison un temple de Rhéa, édifié et dédié par le poète. Dans une de ses odes (1), Pindare s’écrie : « Je veux implorer dans mes prières la mère des dieux, la vénérable déesse que des jeunes filles, accompagnées du dieu Pan, célèbrent, dans mon vestibule, par des chants nocturnes. » Ces jeunes filles sont-elles les Nymphes dont parle Philostrate, comme le veut Welcker ; sont-elles, comme le prétendent d'autres com- mentateurs, des prètresses de la déesse choisies parmi les jeunes Thébai- nes? Nous ne savons ; toujours est-il que la première opinion n’a rien d'in- vraisemblable, qu'elle n’est point contraire au sentiment des scholiastes (2), et qu'elle a pu prévaloir dans l’antiquilé au point de s'imposer aux artistes qui, prenant pour sujet la naissance de Pindare, avaient songé à représen- ter dans un même tableau l'enfant divin, la statue de Cybèle et le dieu Pan. Comment d'ailleurs imaginer que le dieu Pan avait pu se mêler à un chœur de jeunes Thébaines, et non aux nymphes, parfois mes, mais souvent aussi ses gracieuses compagnes ? Il est donc inutile de supposer, pour expliquer la présence des Nymphes dans la composition, qu'elles n'y ont été introduites que par l'imagination de Philostrate se mé- prenant sur le sens d’un passage de Pindare, ou se rappelant que dans le tableau précédent, le dieu Pan était groupé avec les Nymphes (3); et c'est mal raisonner, de lirer de cette supposition toute gratuite un argument con- tre l'authenticité du tableau. Pour revenir à Pindare, ses vers cités plus haut prouvent que le poète, comme les Lydiens (4), unissait dans un même culte Pan et Cybèle : « O Pan, roi de l'Arcadie, s'écrie-t-il quelque part, gardien des sanctuaires augustes, compagnon de la Grande-Mère, toi qui aimes les grâces vénérables et qui fais leurs délices (3) » : Il ajoute dans l'élan d'une piété que nous trouvons presque irrévérencieuse à force d’étre hardie : « O bienheureux toi que les Olympiens appellent le chien fidèle de la grande déesse. » De là naquirent différentes légendes ; on racontait (6) qu'un jour, sur une montagne voisine d'Olympie, Pindare avait vu passer une statue en pierre de Rhéa qui marchait d'elle-même, et qu'ayant consulté l’oracle de Delphesil avait reçu cette réponse : « Élève un temple à la mère des Dieux. » On racontait encore que Pan, plein d’admiration pour un Pœan composé par Pindare, le répétait sur les montagnes, en chantant et en dansant (7). Plutar- que prétend, il est vrai, qu'à celte nouvelle Pindare fut médiocrement charmé, comme si l'admiration du plus grossier des dieux eût été une insulte pour

ennemies et ses victi-


(1) Pyth., TI, ant. 4.

(2) Au moins le Scholiaste laisse-t-il Le choix entre Protomaché et Eumélis, filles de Pindare et les nymphes.

G) Mau, De Phil. fe, pe 121.

(4) Prell., G. M, I, 615,

G) Pind., Frag., 63; Bückh, I, 591.

(6) Sch. ad Pind, P., I, 137.

(7) Plut,, t. IE, p. 1103 A.

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