Page:Une galerie antique de soixante-quatre tableaux (Philostrate de Lemnos, trad. A. Bougot).pdf/525

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colonnes du temple, les deux autres au contraire ont ce mème côté tourné vers le spectateur ét sont vues presque de face. Repliez le chœur sur lui-même ; laissez les premières, celles qui nous tournent le dos, accomplir leur évolution et rejoindre leurs deux compagnes en passant derrière elles : toutes ces jeunes filles seront tournées vers le spectateur. Rien n’empêche de croire que les Heures, dans notre tableau, avaient été groupées d’une façon semblable.

Enfin il ne faut peut-être pas attacher une importance exagérée aux expressions de Philostrale ; quand il dit qu’aucune des Heures n’était vue par derrière, il faut peut-être entendre que celles-là même qui étaient vues de dos tournaient le visage vers le spectateur ; et quand il ajoute qu’il en était ainsi parce que « toutes semblaient venir », il explique peut-être à sa façon, c’est-à- dire avec sublilité, les intentions de l’artiste. Li tournées vers le spectateur, non pour lui laisser voir un visage aimable et souriant, mais pour lui bien montrer qu’elles descendaient du ciel vers lui et pour chercher leur bienvenue dans ses yeux. Une peinture murale anti- que (1) nous montre trois jeunes femmes, Heures ou Grâces, formant un chœur en se Lenant par la main ; l’une d’entre elles, celle qui est placée à gauche du spectateur, semble entraîner ses compagnes ; dans son impétuo- sité elle s’écarte vivement de celle qui la suit, si bien que derrière les bras tendus et les mains enlacées de ces deux femmes, vues chacune de profil, on aperçoit presque tout entière et de face la troisième danseuse. Une dispo- sition analogue parait se concilier assez bien avec les termes mêmes dont se sert Philostrate, surtout si l’on admet, comme nous serions assez disposé à le faire, que la danse des Heures se composait de quatre groupes, formés chacun de trois jeunes femmes (2).

Nous ne discuterons pas la question de savoir si les Heures planaient dans les airs ou se posaient sur le sol ; les détails donnés par Philostrate nous paraissent se concilier avec l’une ou l’autre de ces deux suppositions. Si elles descendaient du ciel, elles effleuraient peut-être du pied les fleurs et les épis, elles semblaient accrocher leur robe aux vrilles de la vigne. Si elles étaient descendues, elles dansaient au premier plan, au milieu d’un paysage où l’œil distinguait les plantes de diverses saisons. Un critique (3) s’est représenté le terrain comme divisé en quatre compartiments, en quatre bosquets, et a blämé l’auteur d’une pareille disposition ; c’eût été là en effet une ordon- nance assez maladroite et contraire même à l’idée de grâce que la danse des

es Heures, selon lui, se seraient



(1) O. Müller, Manuel d’Archéol., Atlas de la trad. Nicard, pl. XXXIX, n° 180.

€) Brann (Zahrb. für Phil, 1811) n’admet que quatre heures en tout ; ces heures se tien- nent alors toutes par la main. Pour expliquer comment aucune n’est vue tout à fait de dos, Brunn groupe ensemble, par la pensée, trois figures empruntées à un candélabre antique du Louvre (Clarac, pl. CLXUI) et une figure d’Eros (Braun, ant. marmw., dec., I, 5) ; Brunn est obligé, comme nous, de ne pas prendre à la rigueur les expressions de Philostrate.

(3) Quadripartitum viridarium ; Matz, De Phil. fide, p. 66.




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