Page:Urfé - L’Astrée, Première partie, 1631.djvu/56

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d’amour. A l’autre des quarrez estoit la caverne de Damon, et de Fortune, et au dernier, l’antre de la vieille Mandrague, plein de tant de raretez, et de tant de sortileges, que d’heure à autre, il y arrivoit tousjours quelque chose de nouveau ; outre que par tout le reste du bois, il y avoit plusieurs autres diverses grottes, si bien contrefaites au naturel, que l’oeil trompoit bien souvent le jugement.

Or ce fut dans ce jardin, que la nymphe se vint promener attendant le réveil du berger. Et parce que ses nouveaux desirs ne pouvoient lui permettre de s’en taire, elle feignit d’avoir oublié quelque chose qu’elle commanda à Silvie d’aller querir, d’autant qu’elle se fioit moins en elle pour sa jeunesse, qu’en Leonide, qui avoit un age plus meur, quoy que ces deux nymphes fussent ses plus secrettes confidentes. Et se voyant seule avec Leonide, elle lui dit : Que vous en semble, Leonide ? Ce druide n’a-t-il pas une grande cognoissance des choses ? Et les dieux ne se communiquent-ils pas bien librement avec luy, puis que ce qui est futur à chacun, lui est mieux cogneu qu’à nous le present ? – Sans mentir, respondit la nymphe, il vous fit bien voir dans le miroir le lieu mesme, où vous avez trouvé ce berger, et vous dit bien le temps aussi, que vous l’y avez renconté ; mais ses paroles estoient si douteuses, que mal-aisément puis-je croire que luy mesme se peust bien entendre. – Et comment dites-vous cela, responit Galathée, puis qu’il me dit paticulierement tout ce que j’y ay trouvé, que je ne saurois à ceste heure en dire plus que luy ? – Si me semble-t’il, respondit Leonide, qu’il vous dit seulement, que vous trouveriez en ce lieu là une chose de valeur inestimable, quoy que par le passé elle eust esté desdaignée. Galathée alors se mocquant d’elle, luy it : Quoy donc, Leonide, vous ne sçavez autre chose ? Il faut que vous entendiez, que particulierement il me dit :