Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/111

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re loy veritablement est celle que la Nature impose aux femmes, d’estre contrainte de vivre, non seulement parmy leurs ennemis, mais encores soubs leur cruelle et tirannique domination, pourquoy falloit-il que le deffaut qu’elle a mis en la force de nostre corps fust cause de nous sousmettre à ce fier animal, qui s’appelle homme? puis que si cette loy devoit avoir lieu, ne devoit-elle pas aussi sousmettre cet homme, au bœuf et au cheval, qui sont encores plus forts que luy. Mais si cette foiblesse est cause de nostre servitude, pourquoy, par la mesme raison, la foiblesse de leur esprit ne nous les a-t’elle aussi sousmis? puis que celle de leurs jugements ne sçauroit estre égalée à celle de nos corps? n’est-ce pas un tesmoignage d’un foible jugement, de vouloir avec passion, et soudain, ne vouloir plus la mesme chose? Quel de tous les hommes n’a trompé celle qui s’est fiée en luy? Qui d’entr’eux a fait difficulté de fausser sa parole et ses sermens, ou plustost ses execrations, quand il a creu en pouvoir abuser quelqu’une? Et puis, ils pensent, ces perfides, avoir bien couvert leurs desloyautez, quand ils disent, que les dieux ne punissent point, il est vray, mais c’est d’autant que, s’ils les vouloient chastier, comme ils meritent, il ne resteroit pas un homme sur la terre, n’y en ayant un seul qui ne jure, en intention de faire le contraire. Leurs desseins sont des chimeres dans les nues, dont l’une n’est pas si tost commencée, qu’elle donne naissance à une autre, qui efface [62/63] la premiere;