Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/114

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me font bien esperer de mon voyage; l’une que les dieux ne sont point menteurs, ny abuseurs en leurs promesses, ayants laissé cette condition aux hommes, et l’autre, que la premiere rencontre que j’ay faite depuis que je suis entrée en ce pays, ne me donne qu’un tres-bon augure de ce que j’y viens chercher, car cous ayant rencontrée la premiere, j’avoue que vostre beauté, vostre courtoisie, et la prudence que vos paroles me témoignent, me font esperer que la fin de mon voyage me sera heureuse. – Les dieux, répondit Diane, ne sont point veritablement ny menteurs, ny abuseurs, mais quelquefois ils se plaisent bien de nous rendre leurs oracles si obscurs, que les hommes bien souvent se trompent et s’abusent eux-mesmes en les expliquant. Et pour ce qui me touche, je voudrois bien, belle bergere, que ma rencontre vous fust utile, comme la vostre m’est agreable, et comme d’affection je voudrois vous pouvoir servir. Que si ce ne vous est importunité, et si vous pensez que quelque chose en cette contrée vous puisse apporter du contentement, dittes-moy, discrette bergere, je vous supplie, quel sujet vous y ameine, et quelle raison vous avez de traiter si mal les hommes.

Alors l’estrangere estant demeurée muette quelque temps, et les yeux baissez et arrestez contre terre, les relevant en fin doucement apres un profond souspir, luy respondit: La demande que vous me faites, courtoise bergere, est si juste et si raisonnable, que je ne feray