Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/130

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déplaire à Paris, pour estre exempte de tout autre desplaisir? Et par ainsi cette consideration ne doit pas empescher de nous emmener avec vous, et Phillis et moy. – Si ce n’est celle-là, adjousta incontinent Phillis en sousriant, ce sera donc la resolution que j’ay de ne point donner à Lycidas la peine de me suivre si loing, ayant fait dessein de ne l’esloigner jamais plus que se peuvent estendre les limites de nostre hameau.

Alexis et Astrée ne se purent empescher de rire du discours de Phillis, qui fut cause qu’elle adjousta: Ne pensez pas, ma sœur, quoy que je die de Lycidas, que je ne vous-ayme autant qu’une sœur peut-estre aymée; mais j’advoue, que l’amitié que je porte à ce berger est d’une toute autre sorte que celle que je ressens pour vous. Que si j’estois aussi sçavante que Silvandre, j’en pourois [73/74] bien peut-estre dire l’occasion; tant y a, qu’il me seroit trop difficile de me priver de sa veue, pour avoir celle de quelqu’autre, et vous ne devez point trouver mauvais que je le vous die librement, puis que jamais le mensonge n’a esté permis entre nous. – Ma sœur, luy respondit Astrée, je ne seray jamais la premiere à vous condamner pour cette humeur, mais ouy bien peut-estre à plaindre nostre esloignement. – Si je pouvois, repliqua Phillis, me separer en deux parties, l’une, pour certain, ne vous esloigeroit jamais en quelque lieu que vous pussiez aller, mais cela ne pouvant estre, permettez-moy que j’observe la promesse que j’ay faite à Lycidas, et de laquelle vous pouvez rendre tesmoignage.