Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/182

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il s’est donné, pourquoy vous en estes-vous allé sans nous en rien dire? - Il est au bout de ses excuses, disoit Diane, à ce coup il ne sçait que [104/105] respondre. – Pour certain, dit Silvandre, si mon voyage eust esté digne d’estre appellé voyage, j’eusse fait ce que vous dites mais n’ayant à faire que deux ou trois mille pas, je creus qu’elle et vous, vous fussiez mocquées de moy, outre que Madonte partit si promptement, qu’il m’eust esté impossible de le pouvoir faire, si je n’eusse voulu manquer à cet office. – Ne voyez-vous pas, disoit Diane, comme plustost que de manquer à sa Madonte, il a mieux aymé faillir au respect qu’il nous devoit?

– Mais en fin, continua Silvandre, est-il possible que le bel esprit de ma maistresse… – raye ce mot, disoit Diane, si ce n’est que tu vueilles parler de Madonte. – est-il possible, dis-je, reprenoit le triste Silvandre, que ce jugement de Diane, qui n’est jamais deceu… – sinon en toy, adjoustoit Diane – Et que vous aussi, continuoit le berger, vous vous soyez laissé abuser si aysément par une fausseté, qui est si descouverte? Dites-moy, bergere, s’il estoit vray que ja fusse amoureux de cette Madonte, et que j’eusse pris avec tant d’affection la charge que Pâris me donna d’advertir, et Tersandre, et elle, de la venue de cet estranger, est-il croyable que cette amour violente m’eust permis de demeurer si long temps à m’en acquiter? Et toutesfois, s’il plaist à Diane de s’en souvenir, je receus cette commission le jour que nous allasmes chez Adamas: or voyez combien nous y demeurasmes, et