Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/203

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faire plus estimer et il sembla que la nature, à l’envy du pere et de la mere, cependant qu’ils essayoient de luy rendre l’esprit beau, luy voulut embellir le corps de toutes les graces qu’elle avoit accoustumé de donner à diverses personnes. Si elle n’estoit point devant vos yeux, j’en dirois davantage tant y a que ,dés les premieres années de son aage, elle devint telle qu’elle attiroit les yeux de chacun sur elle, et les ravissoit d’admiration.

[117/118] L’un des plus proches voisins de Menandre, et peut-estre aussi l’un de ses meilleurs amis, fut ce venerable vieillard que vous voyez de cet autre costé, qui se nomme Arion, pasteur, à la verité sans reproche, et de qui les ancestres ont gouverné longuement avec toute sorte d’integrité les petites affaires de nostre hameau. Mais il faut confesser, et je m’assure qu’il ne sera pas marry que je le die, que son pere a esté plus curieux de luy laisser beaucoup de biens de fortune, de sorte, qu’encore qu’il soit assez riche, il y a peut-este quelques uns de ses voisins qui le sont davantage.

Or Arion avoit eu, deux ou trois ans auparavant que Silvanire nasquit, ce jeune berger que vous voyez auprés de luy, et qui se nomme Aglante, qu’il instruisit en tous les honnestes exercices qui le pouvoient rendre recommandable. L’amitié, et la bonne intelligences des peres, la proximité de leurs demeures, la beauté et la gentillesse de Silvanire, et l’inclination, ou plustost le destin d’Aglante purent tant sur le jeune esprit