Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/47

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que peut-estre elles se tenoient cachées dans quelque buisson prés de là, pour voir ce qu’il feroit, d’autant que c’est le naturel du trompeur de penser qu’on le veut tousjours tromper, il amortit le feu qui estoit sur l’autel, et y jetta de l’eau dessus pour le rafraichir, et presque aussi-tost les portes se fermerent d’elles-mesmes, ce que les nymphes quoy que de loing, purent bien appercevoir, parce qu’au bruit qu’elles firent en se fermant, ces filles tournerent la teste, et virent qu’elles estoient closes. La peur qu’elles avoient eue les fit retourner plus vistement qu’elles n’estoient venues, et lors qu’elles pouvoient parler, ce n’estoit que de la meschanceté de cet homme qui se servoit du manteau de pieté avec tant d’impieté.

Galathée n’estoit point encores sortie du lict, lors que Leonide et Silvie revindrent, car il estoit encore assez matin, et quand elles se presenterent devant elle, elles avoient encore de frayeur le visage si changé, qu’au commencement Galathée eut peur qu’elles n’eussent faict quelque fascheuse rencontre. Mais quand elles luy eurent raconté tout ce qu’elles avoient veu, et ensemble la peur que ces portes en s’ouvrant et en se fermant leur avoient faicte, elle ne put s’empescher de rire, de voir qu’elles trembloient en le racontant. Je vous asseure, madame, adjousta Silvie, quand elle vid que la Nymphe se mocquoit d’elle, que de mon naturel je ne suis guere peureuse, mais j’avoue que ces portes ne se sont jamais ouvertes et refermées d’elles-mesmes, que de frayeur les cheveux