Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/46

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d’en faire à basse voix. Et lors qu’il vid qu’il estoit temps: O grande et redoutable deité, dit-il à haute voix, s’estant relevé et tenant le coing de l’autel, si les prieres et supplications de ces nymphes te sont agreables, ouvre leur les portes de ton sainct temple, afin qu’apres t’y avoir adoré, elles se puissent retirer en leurs maisons avec contentement et satisfaction. Les nymphes oyans ces paroles, prirent particulierement garde aux actions de Climante, pour essayer de recognoistre si à l’ouverture de ces portes il n’y rapportoit aucun artifice de son costé; mais il leur sembla que miraculeusement elles s’ouvrirent d’elles-mesmes, car il ne fit aucune action, ny des mains, ny du reste du corps, qui leur en pust-faire soupçonner chose quelconque. L’ouverture donc du temple estant faitte par un moyen tant extraordinaire, cet imposteur, prenant les deux nymphes par les mains: Allez, ames pures et nettes, leur dit-il, et vous vantez que [23/24] le Ciel vous ayme, et que vous luy demanderez peu de choses qu’il vous refuse. Et, les reconduisant hors de ce lieu, apres quelques petites ceremonies, il joignit les mains, leva les yeux au ciel, et s’en retourna au mesme lieu, où à leur arrivée elles l’avoient veu. Et parce qu’elles estoient grandement effrayées de l’opinion de cet enchantement, elles s’en esloignerent le plus promptement qu’elles purent, leur semblant qu’elles avoient tousjours quelque demon qui les suivoit. Mais Climante qui eut opinion