Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/61

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en demeureroit content.

Or, mes amis, leur dit-il en les embrassant, j’ay bien tousjours esperé que vous auriez plus de soin de mes affaires que je n’en sçaurois avoir; c’est pourquoy je m’en suis reposé sur vous. Peut-estre n’aurons-nous pas affaire de tous ces preparatifs, car il semble que le Ciel veuille que nous parvenions à nostre dessein avec douceur, et non par la force. Je le desirerois, tant pour le bien de cet Estat, que d’autant qu’il semble que cette voye est plus convenable; toutesfois, il se faut preparer à tout, car j’ay resolu, dans huict ou dix jours, d’estre, ou Cesar, ou nul. Je vous supplie donc, et vous conjure de tout mon cœur de revoir tous en quel estat sont les choses dont vous avez voulu prendre la charge, et les tenir en tel poinct, qu’il n’y ait rien à dire, si nous en avons affaire. Et adjoustant à ces paroles plusieurs grandes promesses, ils se separerent, en attendant qu’il fust temps de mettre en effect ce qu’ils luy avaient promis.

Mais cependant que l’ambition de Polemas faisoit jouer tous ces ressorts, et que tout estoit prest de s’envelopper dans un dan-[32/33]gereux trouble, Amour pour cela ne laissoit pas de vouloir avoir part en cette contrée, car il ne donnoit ny treve ny paix à Celadon, que Leonide avoit laissé revestu des habits d’Alexis, fille du grand druide Adamas, dans la maison d’Astrée, sans que ny elle ny ses compagnes, quoy que tres-fines et tres-avisées, le pussent recognoistre, tant il estoit bien deguisé. Mais ce qui estoit encore plus estrange, Lycidas, son propre frere, ny