Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/62

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pas un de ses parens ny plus particuliers amys, n’en eurent jamais aucun soupçon; et cela fut cause que Phocion, lors qu’Adamas le conduisit en sa maison, ne fit aucune difficulté de le loger dans la chambre mesme où couchoit Astrée.

Et de fait, cette belle bergere et sa compagne Phillis, lors que Leonide partit pour s’en aller à Marcilly, ainsi qu’Adamas luy avoit mandé par le commandement de Galathée, firent tout ce qu’elles purent pour se r’endormir; car, outre qu’à peine les premiers rayons de l’aurore ne faisoient que de poindre, encore le desiroient-elles, pour laisser plus longuement reposer ce berger deguisé, et qu’elles pensoient estre un peu malade. Mais la nouvelle affection, ou plustost l’ancienne affection, mais renouvelée, qu’Astrée portoit à ce berger, le croyant fille druide, et la ferme resolution qu’elle avoit faitte de la suivre parmy les vierges des Carnutes, et y consacrer le reste de ses jours au service du grand Tautates, la pressoient de telle sorte, qu’elle ne pouvoit plus ny penser ny s’arrester à imagination quelconque, qu’à celles qui naissoient de ce desir. D’autre costé la gentille Phillis, qui sçavoit en quelle peine la belle et sage Diane vivoit depuis la malicieuse invention de Laonice contre Silvandre, vouloit mal à toute sorte de repos qui l’empeschoit d’aller vers elle, pour essayer de soulager son ennuy, sçachant assez par experience quelle est la douleur qui procede des blessures de la jalousie.

Mais si ces inquietudes travailloient ces belles bergeres, Celadon, qui estoit