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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/101

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Et pour le mien, ce n’a esté qu’un argent qu’il m’a voulu prester en ma necessité, afin que je luy en rende autant et plus grande somme, quand il me la demandera et qu’il en aura affaire. Et en ce dernier point il s’est faict paroistre bon mesnager, puis la vie des hommes estant si remplie de miseres et d’infortunes, c’est faire bien prudemment que de rendre redevables des personnes qui ne soient ingrattes. Que si je manque à ce devoir, qu’il se plaigne alors de moy et m’appelle mescognoissant, mais qu’il ne die pas aussi que volontairement il m’a remis Celidée, puis qu’il n’y estoit obligé par la bonne foy, par sa propre consideration et par les reigles de la prudence humaine, de sorte que tant s’en faut qu’il me la puisse debattre, qu’il est mesme obligé de me la maintenir contre tous ceux qui m’en voudroient empescher la possession.

Dieu en soit tesmoin, mon pere (tel vous appelleray-je, si vous ne me le defendez, le reste de ma vie) Dieu me soit tesmoin, dis-je, si je meurs de regret qu’il faille que je vous contrarie en cette occasion. Mais dittes vous-mesme en quel estat vous m’avez veu, et combien il s’en peu fallu, sans vostre assistance, que l’amour ne m’ait ravi la vie, et puis confessez que c’est amour qui me force à vous rendre ce desplaisir, voire m’y contraint de sorte que je n’ay pas la volonté libre et qu’il m’est impossible de