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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/104

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non pas ayant esprouvé sa propre impuissance et le trop grand pouvoir de ce dieu, me commander chose qu’il n’avoit peu observer, encor que son aage, sa sagesse et sa prudence devoient bien pouvoir d’avantage en luy, que la jeunesse et inexperience qui estoit en moy.

Il se plaindra peut-estre, que je ne luy ay pas porté le respect que je luy devois, et auquel les offices de pere qu’il m’a rendus me pouvoient obliger ? Helas ! qu’il se ressouvienne que c’est par force, et mesme qu’il ne peut se plaindre que je ne luy aye porté tout celuy qu’il pouvoit desirer, puis que j’avois plustost esleu de mourir que de luy en faire rien paroistre, ny à personne quelconque. La peine qu’il eut à descouvrir mon mal, quand j’estois entre les bras de la mort, rend assez de preuve de ce que je dis. Que si ce sage mire, par ruse et par prudence le recogneut à mon poulx et aux changemens de mon visage, helas !s’il se plaint de cela, qu’il loue auparavant le respect que je luy rendois de vouloir plustost mourir que de le descouvrir, et qu’apres il blasme la nature de ce qu’elle ne m’a aussi bien donné le pouvoir de commander à ces mouvements interieurs, qu’à ma langue et à mes actions. Et que toutes ces considerations ne l’empeschent point de juger sainement de ce qu’il doit au fait qui se presente. Luy qui n’a jamais par le passé donné cognoissance que la passion eust