Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/121

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encore une fois, puis, madame, qu’il ne les vous a point cachées. Des violences, des transports, et des desespoirs dont elle est toute pleine, ne furent jamais, ce me semble, des effects de la vertu. Que si nous considerons celle de Thamire, qui y remarquerons-nous que la vertu mesme ? Quand a-t’il commencé de m’aymer ? en une saison qu’il n’y avoit pas apparence que le vice l’y peust convier. Comment a-t’il continue ceste amitié ? en sorte que l’honnesteté ne s’en sçauroit offenser. Mais en fin pourquoy s’en est-il despouillé ? pour les considerations qu’il vous a desduites luy-mesme, Que si en tout cela la raison ne paroit, voire si elle ne parle par tout, je m’en remets à vostre jugement, madame. Tant y a que ces considerations me firent recevoir l’amitié de Thamire, et rejetter celle de Calidon, et que ceste amitié sans plus me contraignit de voir ce berger quand il fut malade, de luy donner des paroles pour remede de son mal, tant pour satisfaire à Thamire qu’à la compassion naturelle que nous devons tous avoir les uns des autres. Que si en aymant Thamire j’ay failly, et bien, Calidon, pour te satisfaire je l’advoueray, et m’en repentiray, avec protestation de n’aimer plus Thamire, ny de tomber jamais en semblable faute. Mais que pour cela je doive estre obligée à