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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/188

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que vous ayez. – Si est-ce, respondit-il, que je crains bien d’avantage vos coups. – Mes coups, dit la bergere, n’offencent point, ou s’ils offencent, ce ne sont que ceux qui le veulent ainsi. – Il est vray, adjousta le berger, qu’ils n’offencent que ceux qui le veulent, mais c’est la raison aussi pourquoy il y en a tant de blessez ; car tous ceux qui vous voyent, desirent d’en recevoir des blessures. – Les coups, repliqua Diane, qui sont desirables, ne doivent point estre redoutez. – Vos blessures, respondit Silvandre, sont desirées, et non desirables, et sont redoutables, et non redoutées. Que si j’ay dict que je les craignois, ç’a esté plustost pour monstrer ce que je devois faire, que ce que je faisois. – Je m’en remets, dit la bergere, à ce qui en est, et me mocque bien de vous, si vous connoissiez vostre bien, que vous ne le suiviez. Mais pour changer de discours, dites-moy, berger, je vous prie, de qui est cette lettre, et à qui elle s’adresse?

Silvandre, ne sçachant comme il l’avoit perdue, lui repondit ainsi : Mon cœur, et vos yeux, quand ils se regardent dans quelque fontaine, vous respondront pour moy qu’elle s’adresse à vous, comme à la plus aymée et plus belle bergere de l’univers ; et vos rigueurs et mon affection vous rendront tesmoignage qu’elle vient de moy le plus infortuné comme le plus fidelle de vos serviteurs. – Mais, luy dit Diane (et en ce mesme temps Astrée et