Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/189

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Phillis arriverent), si ceste lettre vient de vous, pourquoy ne l’avez-vous pas escrite ? – Parce, dit-il, que j’ay trouvé un meilleur secretaire que je ne suis pas ; et faut par force que j’avoue qu’elle doit bien avoir quelque chose de sur-naturel, puisque j’y ay trouvé mes conceptions sans l’avoir escritte, et que la tenant presque tout à cet-heure entre les mains, je la voy entre les vostres, sans la vous avoir donnée. Mais le demon, qui pour moy en a esté le secretaire, me l’a derobée, ou plustost ravie, voyant que j’estois trop paresseux à la vous presenter ; et toutesfois mon dessein n’estoit que d’attendre que vous fussiez seule. – Et comment l’entendez-vous ? respondit Diane. Pensez-vous qu’en particulier je vueille recevoir des papiers que je refuse en general ? – Ce n’estoit pas, replique le berger, pour vostre consideration, mais pour la mienne, que j’avois fait ce dessein, aimant mieux recevoir un refus de vous, sans tesmoin, que non pas devant les yeux de mon ennemie. Mais, à ce que je voy, celuy qui avoit pris la hardiesse de l’escrire pour moy, a bien sceu treuver l’adresse pour vous la faire voir. – Je reçoy, dit Diane, vostre excuse, à condition toutesfois que vous me direz qui a esté vostre secretaire. – Cette nuict, respondit le berger, apres avoir longuement pensé et repensé à ma vie, je me suis endormy dans un