Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/297

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ne m’en croyez, demandez-le à celles qui luy virent faire ce larrecin. Et lors je luy nommay les deux qui l’avoient veu, et qui me l’avoient dit. Et cela a esté cause que se voyant elle-mesme punie par sa propre invention, elle vous a declaré ce qu’elle a creu qui pouvoit rompre nostre amitié. Mais amour n’est-il pas bien juste de luy avoir fait souffrir le mal qu’elle vous avoit preparé ? et n’estoit-elle pas bien outrecuidée, de penser que l’on peut faire semblant de vous aymer, et se servir de vostre beauté pour couvrir l’amitié qu’on luy porteroit ? Je ne veux point que les dieux me soient jamais favorables, si je ne la hay comme la chose du monde que je croy la plus hayssable, et si je ne vous ayme comme la seule personne de qui je desire les bonnes graces. Ne vueillez que cette jalousie obtienne d’avantage par sa mesdisance sur vous, que mon affection, et que le despit qu’elle a eu d’avoir esté desdaignée pour vous ne me nuise, au lieu que cette consideration me devroit profiter.

Je luy tins encores quelques autres semblables paroles, avec lesquelles je n’eus pas d’abord ce que je desirois ; mais je la disposay bien, de sorte qu’apres avoir verifié la larcin que Florice avoit fait de ses lettres, elle me pardonna, et peu apres renoua nostre amitié de plus estroites obligations encore que les premieres, ce qui me retira de sorte de Florice, que je ne faisois