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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/305

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sentir la perte de Florice, car telle estimois-je l’alliance de Teombre.

Et considerez la finesse d’Amour : il connoissoit bien que de m’attaquer tout ouvertement pour elle, il y perdroit sa peine, parce que j’estois encore en colere, il voulut donc me prendre d’un autre costé. Premierement il me propose la haine que je portois à Teombre, combien peu il meritoit cet advantage, et puis me reprensentant la beauté et les merites de Florice, me faisoit regretter que cet homme la possedast, me remettant en memoire toutes les faveurs que j’avois receues d’elle. Bref il les sceut de telle sorte imprimer en mon ame, que je me donnay garde que j’estois plus amoureux d’elle que de Dorinde. Si bien, que quand sa lettre me vint entre les mains, j’advoue que tournant les yeux d’un sain jugement sur sa beauté, sur sa qualité et sur ses merites, je reconnus que j’avois eu tort de l’avoir quittée pour une autre qui valoit moins, et m’en repentant je fis dessein de retourner vers elle. Il est vray, que lisant le remede qu’elle me proposoit pour rompre le mariage de Teombre, je ne sceus jamais m’y resoudre, hayssant ce lien cruel, plus que je ne sçaurois vous dire, non pas pour le particulier de Florice, mais pour le regard de toutes les femmes, me semblant qu’il n’y a point de tyrannie entre les humains si grande que celle du mariage. Si estois-je bien combattu ;