Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/338

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compagnon, se tient de cette sorte, afin que le poids mesme de leurs petits corps favorisast d’autant la force de leurs bras. Ils avoient les visages beaux, mais presque comme bouffis, à cause du sang qui leur montoit au front, pour l’effort qu’ils faisoient, ce que les veines grossies aupres des tempes, et au milieu du front tesmoignoient assez. Et le peintre avoit esté si soigneux, et y avoit travaillé avec tant d’industrie qu’encores qu’il les representast en une action qui faisoit paroistre que chacun vouloit vaincre, si est-ce qu’à leur visage on connoissoit bien qu’il n’y avoit point d’inimitié entre eux, ayant meslé parmy leur combat je ne sçay quoy de doux et de riant aux yeux et en la bouche de tous les deux. Leurs flambeaux estoient un peu à costé où ils les avoient laissé choir ; et de fortune estant tumbez l’un près de l’autre, les endroits qui estoient allumez s’estoyent rencontrez ensemble, de sorte qu’encores que le reste des flambeaux fust separé, les flames toutesfois des deux s’unissant ensemble n’en faisant qu’une, et par ce moyen ils esclairoient ensemble et avec d’autant plus d’ardeur et de clarté que l’une adjoustoit à l’autre tout ce qu’elle en avoit, avec ce mot, NOS VOLONTEZ DE MESME NE SONT QU’UNE.

Leurs arcs estoient je ne sçay comment si bien entrelassez l’un dans l’autre qu’ils ne pouvoient