Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/499

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offert de me prendre à toutes les conditions que je luy voudrais donner. Tesmoin le pauvre Nicandre : je l’appelle pauvre pour l’estrange resolution que mon refus luy fit prendre. Et bref, tesmoins, tous ceux qui depuis ce jour là ont eu la volonté de m’aymer. Tant y a que la memoire de Filandre m’a jusques à ce jour de telle sorte deffendue de semblables coups, que je puis jurer n’avoir pas mesme eu en ma pensée que cela pût estre. Mais il faut confesser que depuis le feinte recherche de Silvandre, je mes sens beaucoup changée, et vous supplie de considerer ce que je vay vous dire. Je sçay que ce berger, au commencement pour le moins, ne m’a servie que par gageure ; et toutesfois dès qu’il a commoncé, j’ay eu sa recherche agreable, et au contraire, je sçay que le gentil Paris m’ayme veritablement, et que pour moy il laisse la grandeur de sa naissance : et toutesfois quelque merite que je recognoisse en luy, il est impossible qu’il fasse naistre en moy tant soit peu d’amour, et proteste que toutes les fois que je le considere, et que je me demande de quelle volonté je suis envers luy, je trouve que ce n’est pint d’autre sorte que s’il estoit mon fere. D’en trouver la raison , il m’est impossible, mais tant x a que cela est tres-veritable. Or, ma sœur, si je dis que j’ayme d’autre façon Silvandre, ne croyez pas pour cela que je sois esprise