Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/70

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au chevet du lict de Calidon, et [me conseilla cependant de faire en sorte que] toutes les jeunes bergeres de nostre hameau et d’alentour le vinssent visiter separement, sous pretexte que la tristesse estant son plus grand mal, il falloit le resjouyr par les divertissemens des compagnies. Et quant à luy, il luy tenoit tousjours le bras, et sans faire semblant de rien luy touchoit le pouls, pour cognoistre quand il prendroit quelqu émotion. De fortune Celidée en ce temps là avoit fait un voyage avec Cleontine, où elle demeura cinq ou six jours : cela fut cause qu’encores qu’elle fust I’une de nos plus proches voisines, elle vint nous visiter des dernieres, car chacun regrettoit de Sorte ce berger et je faisois tant de pitié à tous ceux qui sçavoient mon déplaisir, qu’il n’y avoit celuy qui refusast d’envoyer ou sa soeur, ou sa fille, chez moy.

En fin estant presque desesperez de recognoistre par ce moyen ce que nous desirions de descouvrir, voicy que l’on nous vint avertir que Celidée estoit à la porte. De fortune alors le mire luy tenoit le bras, et son pouls estoit plus reposé qu’il n’avoit esté de tout le jour ; mais quand il ouyt le nom de Celidée, incontinent il s’esmeut et commença de s’eslever, comme s’il eust eu une tres ardante fievre, et puis tout à coup se remettant en son premier estat, ne demeuroit pas long temps sans estre agité de nouveau. Le mire qui estoit avisé, le