Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/818

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conditions que je la porte ? – Si j’en estois capable, respondit Celidée, il n’y auroit rien au monde que je souhaittasse davantage. – Et comment, dit Cleontine, penseriez-vous satisfaire à Thamire, et à Calidon, ainsi que vous avez promis ? – Ce seroit, respondit-elle, le meilleur remede de tous, car ils sont si religieux, qu’estant dediée à Teutates, ny l’un ny l’autre ne voudroit pas m’en retirer. – L’amour, dit Cleontine, est encor plus forte que le devoir, ny que la religion. Mais dites-moy, ma fille, de quelle sorte pensez-vous de les contenter ? Car je ne le puis entendre : en premier lieu, vous ne pouvez estre qu’à Thamire, puis que vous estes sa femme, et quand vous voudriez vous dedier à Teutates, vous ne le pouvez sans la permission de celuy à qui vous estes. Et quand vous seriez une druide, penseriez-vous pour cela les contenter tous deux ? Tant s’en faudroit, vous les mescontenteriez, les privant de vous. – Ma mere, respondit Celidée, le grand dieu qui me mit les paroles en la bouche, lors que pour aleger leur ennuy, je promis ce que vous me demandez, m’en donnera sans doute quelque moyen, puis qu’il ne laisse jamais une œuvre imparfaicte ; il a commencé celle-cy par moy, il me rendra asseurément capable de la finir avic son aide. – Ma fille, dit Cleontine, estonnée des sages propos de sa niepce, je ne suis plus en doute qu’il n’advienne comme vous dictes, pourveu que veritablement