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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/83

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Cleontine, oyant le bruit commun de leur marriage, parce qu’il fut incontinent espanché par tout, ne s’estonna pas beaucoup de voir que sa bergere ne le venoit visiter que quand Cleontine le luy commandoit, jugeant qu’elle le devoit faire ainsi, puis qu’on parloit du marriage ; de sorte qu’en peu de nuits il reprint sa premiere santé, et sortit hors du lict, et peu après de la cabane.

Cependant Celidée ne s’endormit pas, et n’ayant plus d’esperance qu’en la tendre amitié de sa mere, voyant bien que j’avois gaigné Cleontine, d’abord qu’elle la vit, se jettant à genoux le sceut de sorte attendrir qu’elle luy promit qu’elle ne seroit jamais mariée contre sa volonté. Celidée, plus contente de cette asseurance que de bonne fortune qui luy peust arriver, fait tant que nous en sommes avertis, ne luy semblant pas qu’elle eust obtenu entierement ce qu’elle desiroit, s’il n’estoit sceu de nous.

Il seroit bien mal aysée de dire, grande nymphe, si j’en fus plus marri ou plus content ; car d’un costé, je craignois que Calidon ne retombast en l’estat d’où il ne faisoit que sortir, et de l’autre, mon contentement n’estoit pas petit de sçavoir que personne ne possederoit Celidée. Mais lors que je vis que le berger, encor que triste, ne laissoit pas toutesfois de se bien porter, j’avoue que je fus infinement contant de la resistance que la bergere avait faite, et louois