Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/865

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racheter avec ma mort, je ne donnasse volontiers ma vie pour sa rançon, et que je ne la creusse mieux employée, qu’elle ne sçauroit jamais estre, si ce n’est en ce qui concerne ton service ? Et puis que tu m’as faict cette grace de me demander quel est mon desplaisir, permets-moy, je te supplie, qu’avec toute humilité, je te demande quel avantage tu peux pretendre de la ruine de Rome, et de l’Italie ? Est-ce du bien et des thresors ? Outre que ce sont des choses trop viles et indignes de la grandeur de ton courage, encor n’y a-t’il pas apparence qu’un pays ruyné et saccagé, et une ville démolie et presque bruslée, d’où une armée victorieuse ne fait que de sortir, apres y avoir demeuré si longuement au pillage, puisse beaucoup t’enrichir maintenant, toy, dis-je, à qui les thresors de tant de peuples ramassez en un lieu semblent avoir esté destinez par la mort d’Alaric ? Que ce soit la gloire qui t’y conduise, je ne le puis penser ; car quelle gloire desormais peut estre adjoustée à la tienne ? ou quelle peux-tu esperer d’acquerir en ruinant des murs desja ruinez, et massacrant un peuple desarmé, et battu, voire qui ne sçauroit estre plus vaincu, ny sousmis qu’il est ? S’il est honteux de blesser un mort, quel honneur peux-tu attendre par les nouvelles playes que tu veux faire à ce peuple, desja mort, et sans force ? Que ce soit pour raffermir