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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/887

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pour s’en servir aux occasions qui se presentoient en Italie, et en Gaule, mais Genseric ne luy tirit pas mieux sa parolle qu’il avoit faict à Boniface. Car Sisulphus n’est pas si tost en Italie, avec toutes ses legions, que le Vandale se saisit de Carthage, et chassa les Romains de tout le reste de l’Afrique, de sorte que ceste grande ville fut soustraite de l’empire, dix et neuf siecles et demy apres que le grand Scipion l’eust surmontée et acquise à sa Republique.

En ce mesme temps vivoit en une ville d’Afrique nommée Iponne, un tres-grand et vertueux personnage, tant pour la bonte de ses mœurs, que pour sa profonde doctrine, nommé Augustin, tres-grand amy de Boniface, et qui n’adoroit qu’ un seul Teutates. Et quoy qu’ il fut different de la religion que nous tenons, si en estoit-il beaucoup plus approchant que les anciens Romains, car il faisoit le sacrifice du pain et du vin comme nous, et ne recevoit en façon quelconque la pluralité des dieux, et sur tout reveroit ceste Vierge qui doit enfanter, à laquelle il y a tant de siecles que nous avons dedié un autel dans l’antre des Carnutes.

Mais pour revenir à nostre discours, il sembla qu’en ce temps-là le grand Dieu voulut changer les peuples d’un pays en l’autre, et principalement en Europe. Car le regne des Vandales print alors commencement en Afrique ; celuy des Visigoths en Espagne, parce qu’ aussi tost que les