Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/908

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que quand nous ne sommes plus, tout le reste ne nous touche guere ? – L’honneur et l’amour, luy respondis-je. – Et qu’est-ce que l’honneur ? me dit-elle. – C’est une opinion, repliquay-je, que nous laissons de nous et de nostre courage. Et l’amour, c’est un desir de posseder quelque chose de grand et de merite. Et c’est pourquoy, madame, je ne ferois jamais difficulté de mourir en une genereuse action, ny en vous faisant service: en la premiere, pour la gloire qui m’en demeureroit, en la derniere, pour l’affection que je vous porte. – Et comment, me dit elle, tout enfant, vous avez donc de l’amour pour moy ? à quoy l’avez-vous recogneu ? – Aux effects, luy respondis-je, car quand je ne vous vois point, je brusle de desir de vous voir, quand je vous vois, je meurs de regret de ne vous voir pas assez. – Et comment, me dit-elle, vous est survenue ceste maladie et qui en a esté cause ? – Vos perfections, madame, luy dis-je et vos beautez m’ont fait ce mal par la longue demeure que j’ay fait pres de vous. – Si j’estois en vostre place, me respondit-elle, je voudrois y demeurer le moins que je pourrois, mais n’y a-t’il point de remede pour guerir ce mal ? – Si a, luy dis-je, si vous vouliez m’aymer autant que je vous ayme. – Comment, dit-elle soudain, en se tournant vers moy, que je bruslasse-quand je ne vous verrois point ? En ma foy, Ursace, cherchez quelque autre recepte,