Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/914

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qui estoit trop pres de nous, je luy en eusse bien dit davantage. Je me contentay donc de ceste ouverture pour ce premier coup. Et depuis je fis tels vers sur ceste piqueure.


Sonnet


D’une mousche
sur les levres de sa Dame endormie.

Cependant que madame à l’ombre se repose,
Et trompe du soleil la trop aspre chaleur,
Un petit animal volant de fleur en fleur
Les douceurs va cherchant dont le miel se compose.

De fortune sa levre, estant à moitié close,
La fleur representoit la plus vive en couleur,
Lors que cest animal, la voyant par malheur,
Y vole, et la sucçant pensa succer la rose.

Ah ! trop sage au faillir ! trop heureux à l’oser !
Puis qu’à ta hardiesse on n’a sceu refuser
Ce qu’on nye aux desirs dont mon ame s’allume.

Mais ceste mousche, Amour, ravit tout nostre bien,
Que nous reste-t’il plus, puis qu’elle a rendu sien
Le miel dont s’adoucit toute nostre amertume !