Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/954

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

peu remise, car luy addressant sa parole, elle feignit d’avoir un grand contentement de ce que Maxime n’en sçavoit rien, et le conjura de ne luy en vouloir rien dire, et garder que ny luy, ny autre ne le sceust, afin que ne pouvant vivre en effect telle qu’elle devoit estre, elle fut pour le moins en bonne opinion aupres de chacun. L’empereur qui l’aimoit passionnément, et qui sans l’eunuque n’eust jamais usé de force, le luy promet avec tous les sermens qu’elle veut, et le commande si absolument à Heracle qu’il ne faloit avoir peur qu’il y contrevinst.

Apres avoir r’accommodé sa coiffure, et le reste de son habit le mieux qu’il luy fut possible, elle se retire chez elle où elle attendoit la venue de son mary, que Valentinian trouva encor au jeu, et qui s’estoit r’acquitté d’une partie de sa perte. La nuict estant venue, et l’empereur l’ayant licencié, il revint en son logis où il ne fut pas plustost, que suivant sa coustume, il alla voir la sage, Isidore. Elle estoit dans un cabinet toute seule, si couverte de larmes, que quand il la veid, il en demeura tout éstonné, et l’ayant supplié de s’asseoir aupres d’elle : Mon mary, luy dit-elle, ne vous estonnez point de me voir en cest estat. J’en ay tant d’occasion que je ne veux plus vivre, mais avant que mourir, faites-moy un serment qui me rendra contente à jamais, qui est de venger ma mort.