Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/955

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Maxime qui aimoit ceste femme pour sa sagesse, et pour sa beauté, plus qu’il ne se peut croire, voulut s’approcher d’elle, comme de coustume, pour la baiser, et sçavoir ce qui l’affligeoit, mais elle se recula et luy dit : Il n’est pas raisonnable, Maxime, que ce corps souillé comme il est, s’approche de vous. Je ne suis plus ceste Isidore que vous avez tant aimée, et qui n’aima jamais rien que vous. Je suis (ô amy, que je n’ose plus nommer mon mary), je suis une autre femme que je ne soulois estre ! Le plus meschant et le plus grand tyran qui fut jamais, m’aiant de sorte souillée que je ne veux plus vivre, ne meritant pas de vivre vostre femme. Et sur cela luy raconta tout ce que je viens de vous dire, luy monstrant pour marque de ce qu’elle disoit sa bague, les meurtrisseures qu’elle s’estoit faites, et le sang d’Heracle, qui en la tenant luy estoit tombé dessus.

Je serois trop long si je voulois redire les plaintes qu’elle et Maxime firent ensemble. Tant y a que du tout resolu à la vengeance, il la pria de n’avancer point ses jours de peur d’irriter Dieu contre elle, et qu’elle pust avoir le contentement de la vengeance qu’il luy promettoit de faire si grande, qu’elle auroit sujet de satisfaction. Et que cependant n’ayant point consenty de la volonté à ceste violence, elle creust qu’il ne la croyoit pas moins chaste, ny moins digne d’estre sa femme qu’auparavant, que pour achever le dessein