Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/113

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donné quelque cognoissance, le retardement que je mettray à m’en aller le dernier ne vous en rendra pas moins de tesmoignage. Mais je voudrois bien que ma venue fust aussi aggreable à vostre compagnie comme elle a este desirée de moy. – II n’en faut nullement douter, dit Leonide, n’est-il pas vray ? ma sœur. – J’avoue, respondit Alexis, que quant à moy j’en reçois beaucoup de contentement. Hylas alors s’approchant d’elle : Vous voyez, belle Alexis, dit-il assez bas, comme je ne suis guere fascheux à contenter. Pourveu que de vous trois, vous seule l’ayez aggreable, ce m’est assez. – Et quoy ? reprit Leonide, feignant fort à propos d’en estre faschée, estimez-vous, glorieux berger, si peu le reste de la compagnie ? Je vous asseure que je m’en vengeray, et qu’avant que la journée se passe, vous vous repentirez du mespris que vous avez fait de moy. Elle profera ces paroles avec un visage severe, et representant fort bien ce feint mécontentement. Mais Hylas, qui de son naturel ne se soucioit de femme du monde, que de celle qu’il aymoit : Je m’en repentiray, dit-il, lors que la belle Alexis se repentira de ce qu’elle a dit, et avant que cela soit, si vous ne voulez perdre vos peines, ne cherchez point de vous venger de moy. Et lors qu’elle s’en repentira, ne prenez non plus la peine de faire cette vengeance ; car le desplaisir que j’en auray sera si grand, que vous n’y sçauriez rien adjouster. –