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Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/213

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Chacun estant desja levé dans le logis, Delie fut contrainte d’en faire de mesme, et il fallut que je me renfermasse dans ma prison, car elle ne voulut jamais permettre que je la visse habiller, parce qu’il falloit qu’elle fust servie de ses filles. Je luy offris bien, et l’en suppliay, de me permettre que je fisse ce matin l’office de ses demoiselles, mais ce fut en vain, quoy que sa sœur, en sousriant ; luy dist que j’estois si accoustumé de donner la chemise au grand Euric, qu’il ne falloit point douter que je ne luy sceusse bien donner à elle aussi. – Vous sçavez bien, luy respondit-elle, que la chemise des femmes est cousue jusques en bas, ce que ne sont pas celles des hommes, et je craindrois qu’en me la mettant, il ne la décousist ou la déchirast, et par ainsi il vaut mieux que ce soient mes filles. – Criez, dit Daphnide, s’il vous fait mal. – Il n’est plus temps, respondit Delie, de crier quand le mal est fait ; il faut que ce soit auparavant, afin qu’il ne se fasse. Et pour conclusion, dit-elle en sousriant, encore que cet oyseau soit bien privé, il faut qu’il demeure en cage. – Vous voyez, Alcidon, dit Daphnide, comme mes persuasions ont peu de force ! – Madame, luy respondis-je, je ne parle point pour ma liberté, puisque je vois que vos paroles sont inutiles, mais je prie Amour que quelques fois il me vange d’elle.

– Amour, dit-elle, n’a rien à faire avec Diane. – Et toutes-fois, luy dis-je, pour baiser un Endimion, cette Diane quitta bien le Ciel. Et peut-estre