Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/306

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ce qu’Alcyre desiroit de luy persuader, à sçavoir, que cette familiarité procedoit de quelque autre plus grande, mais plus cachée, qu’il avoit avec sa maistresse. Et d’autant qu’il estoit homme plein de franchise et qui ne pouvoit rien porter dessus le cœur contre personne, un jour qu’il le trouva à propos, il luy dit : Est-il possible, Alcyre, que vous ayez autant d’affaires avec cette fille de Clarinte que vous en faites de semblant ?

Alcyre, qui vid reussir si bien son dessein, ne luy respondit au commencement qu’avec un petit sousris. Et apres : Que voulez-vous, continua-t’il, que je vous die ? Vous possédez tellement la maistresse, qu’il faut, quand vous y estes, si je ne veux demeurer seul, que je parle à celle que vous me laissez. - II me semble, adjousta Amintor, qu’autresfois vous ne souliez point faire ainsi, et que je ne suis point plus possesseur de la maistresse que je le soulois estre. Qu’y a-t’il donc de nouveau ?

Alcyre demeura quelque temps sans respondre, et, le regardant, sousrioit comme faisant le fin, dont Amintor se troubla encore davantage, et, voyant qu’il ne disoit mot : Que veut dire, reprit-il, que vous ne me respondez point ? Y ay-je quelque interest, ou n’est-ce point à mes despens que vous vous entretenez ensemble ? S’il est ainsi, pour le moins, que je le sçache, afin que j’aye ma part au passe-temps.

Alors, Alcyre, avec un visage plus serieux : Amintor, luy dit-il, quand