Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/34

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cette obligation par les reproches dont vous usez envers moy. Et d’autant qu’elles me sont aussi difficiles à supporter, qu’il m’est impossible de ne recognoistre une grace lors que je l’ay receue, je suis contraint de leur respondre, apres avoir advoué encore une fois pour ma satisfaction que je vous suis redevable, mais non pas tant que vos paroles nous veulent persuader, car qu’est-ce que je vous dois, et qu’avez-vous fait pour moy ?

Cela mesme que feroit l’aboy de Driopé, si quelqu’un sur-venoit quand Diane est endormie. Je confesse toutesfois que la peine que vous y avez prise merite d’estre recogneue, mais quelle recognoissance vous doit-on ? celle-là mesme que Diane a acco stumé de faire à son cher Driopé, lors qu’il a fait quelque chose qui luy a esté agreable. Que si vous luy demandez quelle elle est, elle vous dira que pour toute recompense, elle luy met la main sous Ie menton, l’approche de sa joue, et luy donne deux ou trois petits coups sur la teste. Puis que vous n’avez rien fait davantage pour moy, vous devez estre contente du mesme payement.

Astrée et Diane ne se peurent empescher de rire de cette plaisante responce, et Lycidas mesme qui y estoit survenu en mesme temps, lors que Diane ayant repris son haleine, dit à Silvandre : Encores oubliez-vous, berger, que quelquesfois pour le caresser davantage, je luy crache au nez. - S’il ne tient qu’à cela, ma maistresse, dit Silvandre, que je ne sorte de l’obligation que je luy ay, j’y satisferay