Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/343

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plus qu’il n’a pas faict, d’autant que vous feriez sçavoir à toute la Cour ce qu’il n’a faict entendre qu’à vous seul ; et vous sçavez combien la calomnie tache aisement la reputation des femmes, puis que nostre justification ne peut estre qu’envers quelques particuliers, et les mesdisances s’espandent par toutes les oreilles.

- Madame, dit Amintor, ce dernier commandement m’est bien difficile, et je vous supplie de considerer que, quand ce ne seroit pas pour vous vanger, encore suis-je obligé de faire cognoistre à cest imposteur que je ne suis pas personne qui souffre telles offences, parce que nostre reputation est si chatouilleuse, qu’encores que personne n’en sçache rien, toutefois, si en nous-mesmes nous pensons avoir souffert sans ressentiment quelque indignité, nous ne sommes plus dignes d’estre appellez personnes d’honneur, car la conscience vaut mille tesmoins.

- Amintor, luy dit-elle, je veux que vous fassiez cela pour moi, et que vous ayez ceste consideration en vous-mesme que, si Alcyre et vous sçavez la tromperie qu’il vous a faicte, vous aussi et Alcyre, vous sçaurez sa meschanceté et sa perfidie. Et pour ce qui vous touche, quand vous vous souviendrez que tout chevalier est obligé autant à l’honneur des dames comme au sien propre, vous cognoistrez, Amintor, que vous devez avoir soin du mien, et que vous ne devez point faire action qui le puisse blesser. Je