Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/47

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ne se gueres soucier de cette visite, encore que ce fust celle qui y avoit le plus d’interest ; mais n’en voulant donner cognoissance à personne, elle ne voulut rien adjouster à son habit ordinaire, outre qu’elle sçavoit assez que ce n’estoit plus la beauté qui luy devoit redonner le bonheur qu’elle desiroit, mais la seule fortune, tout ainsi que seule et sans raison elle le luy avoit osté, et toutesfois en cet habit simple et sans artifice, elle paroissoit si belle, que Leonide n’en pouvoit oster les yeux. Apres quelques propos communs, Paris qui estoit passionnément amoureux de Diane, et qui pour luy estre plus agreable, avoit pris les habits de berger, ne pouvant attendre sa venue, dit au sage Adamas, que, s’il le luy permettoit, il iroit volontiere treuver ces belles bergeres qui devoient venir visiter sà sœur, pour les conduire par un chemin plus court et plus beau, qu’il avoit appris depuis peu.

Le druide qui sçavoit bien l’’affection qu’il portoit à Diane, et qui n’en estoit point marry, pour les raisons que nous dirons cy apres, loua son dessein, luy remonstrant que la cour-toisie entre toutes les vertus, estoit celle qui attiroit plus le cœur des hommes, et qui estoit aussi plus propre et naturelle à une personne bien née. Avec ce congé, Paris prit incontinent le chemin de Lignon, et, descendant à grand pas la colline, quand il eut passé sur le pont de la Boteresse, il suivit la riviere,