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Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/568

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elle estoit entre les bras de Tersandre, et le combloit des plus estroictes faveurs que vous eussiez peu desirer ? Vous pourrez contre raison exposer vostre vie, pour deffendre celle d’une personne qui ne l’employe qu’à vous mespriser pour le contentement d’un autre ? Voulez-vous qu’on die que vous vous armez injustement pour conserver les plaisirs et les delices de Tersandre ?

Il vouloit continuer, lors que je l’interrompis : Cesse, luy dis-je, Halladin, de me tenir ce langage, la pierre en est jettée, je suis resolu à ce que je t’ay fait entendre. Et pource que tu m’as dit, et que tu peux dire, je te veux seulement opposer cette consideration. Quand je me représente la mort de Madonte, et que je ne verray plus celle que j’ay tant aymée, la peine et la confusion où elle se trouve, la honte qui luy est préparée, et que je me ressouviens que c’est celle que Damon a si longuement servie, que ces mains que l’on luy doit lier de viles chaisnes, sont celles que j’ay tant de fois baisées avec tant de transport, que cette beauté et ce corps que j’ay tant admiré et honoré, sera bien tost profané et jetté dans le feu, ô Dieu ! Halladin, comment penses-tu que je le puisse supporter ? Ou que ces choses se venans representer à moy, il y puisse avoir quelque mespris ou quelque outrage qui m’empesche de luy donner tout le secours qui peut despendre de moy ? Non, non, Halladin,