Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/577

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patience.

Et parce que Halladin qui se desplaisoit de mes longs et ennuyeux voyages, me conseilloit avec plusieurs raisons de ne point aymer d’avantage celle, qui ne pensoit pas seulement que je fusse encore au monde ; luy semblant que, quand il auroit obtenu cela sur moy, je me resoudrois aysément à m’en revenir en Aquitaine, afin de luy en oster l’espéerance, je chantois bien souvent ces vers :


Sonnet

Qu’il aymera tousjours.


Mais en fin c’en est fait, Raison, que cherches-tu ?
Chacun doit, je le sçay, suivre ses destinées,
Et non, comme Titans, aux choses ordonnées
Vouloir changer du Ciel le pouvoir invaincu.

Bien souvent contre moy j’ay ce poinct debatu,
Mais comme du haut ciel les spheres entrainées
D’un effort violent toutes fois obstinées,
Chacune fait son cours par sa propre vertu.

Aussi je me resouz, quoy que Fortune ordonne,
Me soit-elle mauvaise, ou me soit-elle bonne,
De suivre cest amour en despit du destin.