Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/653

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pas procedé de faute d’affection, mais d’un peu de prudence, je pensay que j’estois obligée de l’en advertir, et cela d’autant qu’il sembloit qu’il n’attendist ce contentement de moy, faisant continuer la musique, comme s’il m’en eust voulu donner le loisir. Je pris donc la plume sans beaucoup considerer ce que je faisois, et le plus hastivement que je peus, je luy escrivis de cette sorte.

Lettre de Cryseide à Arimant.

Ma plainte serait bien plus juste, si l’amitié que je vous porte me permettait de me pouvoir plaindre de vous, et si la vostre luy estait esgale, elle ne souffrirait non plus, que vous peussiez vous douloir du refus que j’ay faict, ny que vous le prinsiez pour un tesmoignage de peu d’amitié, puis qu’il n’est procedé que du dessein que j’ay eu d’estre meilleure mesnagere de mon honneur et de vostre repos qu’en cette action vous ne l’avez esté. Ce que je m’accuse toutes fois de defaut, mais plustost d’excez d’affection, qui ne vous a laissé considerer en quel danger vous me mettiez, et en quelle obligation vous vous restraigniez envers une personne qui m’est incogneue, et qui ne vous est asseurée, qu’autant que