Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/776

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tellement amoureux d’elle, qu’il a monstré avoir intention de l’espouser. Jugez maintenant s’il n’est pas bien necessaire d’user de diligence pour la retirer hors de ces contrées, et quelle doit estre l’affection que Cryseide vous porte, puis qu’elle a mieux aymé se mettre au hazard que je vous ay dict ; que d’estre royne en espousant un si grand roy. J’ay donc pensé que vous pourrez faire de cette sorte. Il faut que dés ce soir vous priez le capitaine de me laisser retourner vers Bellimart, monstrant d’estre mal satisfaict de moy, pour m’en estre revenu sans attendre son retour, il le fera fort aisément, et demain, ainsi que les portes s’ouvriront, vous prendrez mes habits, et je demeureray en vostre place dans le lict. J’espere que les dieux favoriseront nostre entreprise, et qu’ils la feront reussir heureusement. – Mais, mon Dieu ! Bellaris, dit Arimant, je crains que ces gens ne te fassent du mal. S’il se pouvoit prendre une autre voye, je croy qu’elle seroit bien plus à propos. – Non, non, seigneur, dit le fidelle Bellaris, il n’y en a point ; car en premier lieu, le temps vous presse ; et ne faut pas avoir opinion que par presens on puisse corrompre cet homme qui vous garde, parce qu’il croit vostre rançon devoir estre tres-grande, et il y a apparence que Bellimart luy en aura promis une partie. Et quant à ce qui est de moy, ne vous en souciez point, d’autant que je sçay asseurément