Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/927

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Je serois trop long, si je voulois rapporter icy par le menu tous les rapports qu'amour et le soleil ont ensemble ; il suffira donc, bergere, que reprenant ce que j'ay desja dit, vous entendiez que ces fleurs que vous mesestimez si fort, et qui sont, à ce que vous dites, aussi tost flestries que produites, ce sont les esperances qu'amour nous donne en son printemps. Et si cela est, que direz-vous que signifie ce chapeau de fleurs pris de la main de Diane, à ses pieds où je l'avois posé, pour le mettre sur ma teste, sinon que l'esperance que je m'estimois n'estre pas digne d'avoir, elle veut que je la prenne de ses propres mains. O Amour ! quelle plus grande faveur pourrois-je recevoir de ma belle maistresse ? O Phillis ! que ces fleurs me sont cheres et agreables. Et mesme considerant la suite de ceste faveur : voilà donc ces belles fleurs qui sont le Printemps de mes esperances, et pensez-vous que l'Esté n'ait pas suivy incontinent apres ? Et ne voilà pas le baiser de ceste belle main qui me donne les fruicts de cette esperance ? Mais n'ay-je pas l'Automne et l'Hyver par ce beau soleil de mon ame ? Sans doute, Phillis, ma belle maistresse n'y a rien oublié quand elle a ordonné que pour marque eternelle, je portasse cette belle couronne parmy les bergers : voilà la jouyssance de l'Automne, et que j'en renouvellasse continuellement les fleurs, et voylà les moyens de pouvoir conserver longuement le bonheur que j'ay reçeu.

Mesprisez à cette heure,