Page:Uzanne - Son altesse la femme.djvu/78

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pas que de nous troubler. La littérature poétique du xvi° siècle nous peint la femme blonde ; partout ce sont des tresses blondoyantes, des fils d’or, des espis meurs, des mousses frisottantes ; il semble que les Cythèrêes de ce gentil Parnasse blondissent comme les Roynes symboliques de Tescole de Venise. C’est à peine si quelques jeunes poètes osent célébrer les grâces accentuées de la brunette, et l’amoureux Guy de Tours, voulant vanter sa maistresse à son amy Guy Favereau, advocat en parlement, s’excuse pres- que de luy veoir la chevelure et les yeux ébesnins :

Il est vray, je le confesse,

Favereau, que ma déesse

A les cheveux brunelets,

Et les deux yeUx noirelets ;

Qu’elle a de brune teinture

La délicate vousture

De ses sourcils gracieux,

Dont amour ingénieux

Fait l’arc duquel il me jette

Au cœur sa fière sagette.

Mais pour cela, Favereau,

Son visage est-il moins beau ?

Sa grâce est-elle moindre ?

Son œil en peut-il moins poindre ?

Et le coral doux, riant/

De sa bouche moins friand ?

Guy de Tours ne semblç-t-il pas effrayé comme d’un crime de lèze-esthétique d’oser adresser à une brunette ses souspirs amoureux ? Olivier de Magny,