les voyageurs y mettent ; nous devions souper
ensemble pour masquer mon intelligence avec
le comte, mais notre moine égrillard n’en fut
pas la dupe : il saisit un instant où le comte
était allé donner des ordres, pour me dire qu’il
allait aussi à Lyon, qu’il voyageait avec ses
chevaux, et qu’il ne pourrait y arriver aussitôt
que moi, mais que si je voulais l’attendre à
Valence, au Louvre, il m’y trouverait le lendemain,
avec grand plaisir ; qu’il voyait aisément
ce qui retardait mon voyage ; qu’il aurait désiré
être arrivé le premier, mais qu’il s’en consolerait,
persuadé qu’un lendemain avec moi, serait
encore très agréable. Il ajouta qu’il n’était pas
aussi brillant que le comte, mais que je le trouverais
plus solide, et que les marques de sa
reconnaissance surpasseraient les siennes.
Je fus surprise de la sagacité de dom Tapefort : ce qu’il offrait était trop raisonnable, ce qu’il avait découvert trop vrai, pour le refuser : je n’eus que le temps de lui dire :
— Tout est accepté, ne laissez rien percer de vos intentions sur moi, et prenons patience.
— Cela vous est aisé, belle dame, répondit-il, mais l’espérance me reste ; à demain soir.
Le comte parut, on rentra dans la salle à manger ; le souper fut agréable, point d’autres que nous à table, où Fanchette fut admise, comme elle l’avait été à la promenade. Le brave