À MES LECTEURS
Avant de publier ces souvenirs sur les hommes et sur les choses de mon temps, je m’adressai deux questions.
La première fut celle-ci : Ai-je dans le cœur une haine, un désir de vengeance, une rancune contre qui que ce soit ? — Non.
L’homme, aussi bien que tous les animaux, a reçu de la nature un instinct de conservation pour sa vie. L’homme seul a reçu de la société un instinct de conservation pour ses intérêts. Il y a donc dans l’homme un moi animal qui se défend contre la douleur et contre la mort, et un moi social toujours prêt à se défendre contre des événements et des rivalités qui offensent son orgueil ou le privent de bien-être. Quiconque cherche à nuire à son prochain cède à une douleur morale. C’est là certainement une circonstance atténuante pour les méfaits de l’humanité. Aussi, n’ai-je jamais