à pied, un soldat du 88e de marche, et deux gardes mobiles ? Un de ces derniers misérables, lui mettant le poing sur la figure, lui criait : “ Tu m’as donné une fois trente jours de prison ; c’est moi qui te tirerai le premier coup de fusil. ” C’était une scène hideuse, à rendre fou, bien que nous ayons tous fait le sacrifice de notre vie. Il était cinq heures. Une clameur immense domine toutes les autres, une bousculade affreuse a lieu dans la cour et nous voyons tout à coup jeter au milieu de nous un vieillard inconnu qui n’avait évidemment plus que quelques instants à vivre. Le lieutenant Meyer me dit que c’était Clément Thomas, qui venait d’être arrêté rue Pigalle au moment où il se promenait en curieux ; qu’il avait été reconnu par des gardes nationaux et traîné aux Buttes Montmartre pour partager notre sort.
“ Dès lors la fureur des gardes nationaux ne connaît plus de bornes : c’est à peine s’ils n’assomment pas leurs courageux officiers qui nous défendent avec énergie et désespoir, car ils sentent qu’ils deviennent impuissants à nous protéger longtemps. En vain un individu vêtu d’une chemise rouge monte-t-il sur un mur d’où il adjure la foule de nommer une cour martiale qui statuera sur le sort des prisonniers ; en vain leur dit-il qu’ils vont commettre un lâche assassinat et souiller la République qu’ils acclament si haut : tout est inutile. L’arrivée imprévue du malheureux